Ces dernières années, il faut bien l’admettre, Bruxelles se défend comme un “Lion” dans le registre de ce que l’on appelle “le durable”. Dernière démonstration en date: le projet de réaffectation du site logistique occupé par Ahold-Delhaize en plein cœur du quartier d’Osseghem, dans la commune d’Anderlecht.
Quand Delhaize décide de quitter son centre logistique du quartier d’Osseghem en 2019, sur le territoire de la commune d’Anderlecht, c’est le sort de près de 4,4 hectares qui est mis en jeu. 4,4 hectares, une goutte d’eau si l’on considère le territoire de la Région wallonne, mais un sacré terrain de jeu à l’échelle du territoire de la Région de Bruxelles-Capitale où l’espace est forcément rare. Autre dimension quasi-critique à prendre en compte: tout faire pour maintenir l’équilibre délicat de la fonction économique et du logement. Cet équilibre est devenu depuis plusieurs années l’obsession du gouvernement bruxellois, et par ricochet, celle de Citydev, organisme public régional à la fois chargé de l’expansion économique et de la rénovation urbaine. Il y va de l’équilibre financier de la Région qui, on le sait, doit lutter depuis des années contre un exode touchant à la fois l’activité économique et les couches plus favorisées de la population.
Dès l’annonce de la décision de Delhaize de quitter la zone en 2019, la Région a mandaté une brochette de bureaux spécialisés pour voir ce qu’il pouvait advenir des bâtiments délaissés par Delhaize/Ahold. Les experts de ces bureaux ont travaillé tels des fourmis pour radiographier le site, passant chaque mur, chaque poutrelle, chaque travée au peigne fin. Objectif: établir une typologie des bâtiments, préparer le terrain, et détecter le cas échéant ce qui pourrait éventuellement être récupéré, réparé, réaménagé et ce afin de réserver aux constructions un sort plus enviable qu’un enterrement de première classe avec grues à boule de destruction et tutti quanti. Le travail préparatoire magnifique de ces experts peut notamment être observé ici: http://web.citydev.brussels/docs/LionCity.pdf Un an plus tard, la Région s’est très judicieusement portée acquéreuse du foncier et des bâtiments. Et surtout, a imaginé un sort enviable à cette portion du territoire.
Aujourd’hui, c’est une autre phase de ce beau boulot que l’on observe avec la mise en place d’un plan concret de réaffectation de la zone. Le marché de promotion doit encore être attribué, mais l’on peut d’ores et déjà dire que l’esprit circulaire de la Région transparaît clairement dans les directives données par l’adjudicateur. Le programme prévoit en effet environ 24.400m² de logements acquisitifs Citydev, 4.150 m² de logements sociaux SLRB, 15.240 m² d’ateliers, un nouveau supermarché Delhaize de 3.400 m², 1.000 m² de commerces, ainsi que 2.100 m² de commerce/HORECA/équipements libres, l’aménagement d’espaces publics et même -et c’est devenu récurrent à Bruxelles- de vrais espaces dédiés à l’agriculture urbaine. Tout ceci avec l’ambition de conserver, de réutiliser ou (au pire) de recycler tous les matériaux qui peuvent l’être, mais en aucun cas de jeter sans avoir réfléchi à un usage possible de la brique, du béton, de l’acier ou du verre. Ici, c’est Batiterre et Drees & Sommer qui, dans le sillage de l’asbl Rotor, entrent dans le bal avec un inventaire précis en vue de réutiliser un maximum de ressources. Bref, tout le contraire de ce à quoi on assiste plus au sud du pays avec ce qui me fait penser à une consommation gloutonne des espaces libres, aux bordures des villes, avec le déploiement de parcs d’activité dont certains restent parfois bien vides.