Il y a peu de temps encore, le Rapport CSTC 19 était considéré comme l’ouvrage de référence pour la conception des fondations sur pieux. Le Rapport 20, publié entre-temps, constitue toutefois une révision de ce document. Le présent article aborde les principales nouveautés : nouvelle catégorie de pieux, cadre de qualité adapté et utilisation de ce cadre dans la pratique. Un article de Noël Huybrechts, ir., chef de la division ‘Géotechnique, structures et béton’ du CSTC, et Maarten De Vos, ir., chef adjoint de la même division, publié dans le magazine Contact n°72.
Une révision nécessaire
En Belgique, la conception de fondations sur pieux sous charge axiale doit se faire conformément à l’Eurocode 7 et à l’annexe nationale correspondante (ANB). Les Rapports du CSTC apportent en outre des directives complémentaires visant à l’application pratique de l’Eurocode et de son ANB. Toutefois, le cadre de qualité introduit dans le Rapport 19 avait suscité quelques réserves d’ordre pratique et juridique, si bien que l’actuelle ANB fait encore toujours référence au Rapport 12, qui expliquait en détail la méthode de conception belge.
C’est pour remédier à cette situation qu’il a été décidé de publier le Rapport 20 (en remplacement du Rapport 19), de mettre à jour l’ANB et d’adapter le cadre de qualité pour le dimensionnement et la réalisation des pieux de fondation. Le tout en collaboration avec l’UBAtc et le BCCA.
Les modifications ont été apportées en concertation avec l’Association belge des entreprises de fondation (ABEF) sous l’égide de la commission belge de normalisation pour l’Eurocode 7 (NBN E25007).
Nouvelle catégorie de pieux : les micropieux
Le tout nouveau Rapport 20 aborde désormais aussi les directives relatives au dimensionnement des systèmes de micropieux. Il s’agit de pieux forés d’un diamètre nominal maximal de 300 mm constitués d’un élément d’armature que l’on scelle dans le sol au moyen d’un coulis de ciment. Les micropieux étant installés à l’aide d’appareils de forage relativement compacts et flexibles, ils conviennent parfaitement à la mise en œuvre de fondations profondes dans des zones difficiles d’accès. De plus, ces pieux sont régulièrement utilisés pour approfondir ou renforcer des fondations.
Les micropieux dits autoperforants sont fréquents en Belgique. Les éléments d’armature sont des tiges creuses en acier de 3 à 6 m de long que l’on fore dans le sol pendant qu’on injecte un mélange eau-ciment. En assemblant les éléments de renforcement entre eux au moyen de manchons, les micropieux peuvent atteindre de (très) grandes profondeurs.
Le Rapport 20 distingue trois sous-catégories de micropieux, qui diffèrent principalement en fonction du mode d’injection du coulis de ciment. Il a effectivement été démontré que la façon dont le coulis était injecté avait un impact considérable sur la capacité portante des pieux.
La méthode de dimensionnement décrite dans le Rapport 20 se limite aux micropieux d’un diamètre nominal maximal de 180 mm, car peu d’essais ont été menés sur des micropieux d’un diamètre supérieur.
Un cadre de qualité adapté
Le Rapport 20 propose en outre un cadre de qualité pour les systèmes de pieux. Ce cadre, développé par l’UBAtc et le BCCA en collaboration avec le CSTC et l’ABEF, doit permettre aux entrepreneurs de demander un agrément technique (ATG) avec certification pour leur système de pieux. L’agrément technique décrit ce dernier en détail et précise les facteurs de dimensionnement ainsi que les conditions limites applicables. La certification est basée quant à elle sur un contrôle et un audit réguliers de l’entrepreneur. Cet audit couvre à la fois le dimensionnement et la mise en œuvre du système de pieux.
Grâce à ce cadre de qualité, les entrepreneurs qui font réaliser des essais à leurs frais et qui souhaitent démontrer la qualité de leur système ont la possibilité de valoriser cet investissement en indiquant des facteurs de dimensionnement plus avantageux dans l’agrément technique. Ce principe permet de couvrir les systèmes de pieux innovants qui ne seraient pas envisagés dans les documents normatifs et les Rapports.
L’agrément technique et la certification sont octroyés par l’UBAtc et le BCCA, mais le Rapport autorise également les systèmes de certification équivalents.
Les entrepreneurs qui ne disposent pas d’un agrément technique avec certification (ou d’une attestation équivalente) pour leur système de pieux peuvent néanmoins se baser sur les paramètres de dimensionnement – plutôt conservateurs – figurant dans le Rapport 20.
Mise en œuvre pratique
En 2019, le secteur a été informé de la création de ce cadre de qualité et les professionnels ont été invités à soumettre un dossier de demande pour leur système. L’objectif était de leur donner la possibilité d’obtenir en même temps un agrément technique avec certification. Cet appel a connu un succès retentissant et la première série d’agréments techniques est en cours d’élaboration au sein de l’UBAtc et de BCCA.
Soulignons enfin que le Rapport 20 ne sera applicable qu’après la publication de cette première série d’agréments techniques avec certification et après la révision de l’annexe nationale belge de l’Eurocode 7 (NBN EN 1997-1 ANB).
Source : CSTC Contact 2020/6 (n°72), pp. 4-5.