Les matériaux naturels et locaux à faible impact environnemental connaissent un succès croissant depuis quelques années. Ce phénomène se ressent également dans l’engouement pour les enduits à base d’argile, des matériaux naturels à base de terre non cuite. En optant pour ce type d’enduits, il faut néanmoins tenir compte de leur sensibilité à l’humidité et de leur résistance mécanique inférieure à celle des enduits intérieurs habituels. Un article d'Inge Dirkx, ir., chef adjoint du laboratoire ‘Matériaux de construction’ au CSTC, paru dans le magazine Contact n°76.
Les enduits à base d’argile peuvent être utilisés comme enduits intérieurs. Ils sont composés d’argile, de limon, de sable et d’éventuels additifs. L’argile agit comme liant. On qualifiera l’enduit de ‘gras’ ou de ‘pauvre’ selon qu’il contient respectivement plus d’argile ou plus de limon et/ou de sable.
Le durcissement de ces enduits est obtenu par séchage physique sans réactions chimiques. Ils redeviennent mous au contact de l’eau. Plus la quantité d’eau augmente, plus les forces de liaison diminuent.
Produire ces enduits n’entraîne pas une forte consommation énergétique. En effet, l’argile n’a pas besoin d’être chauffée et doit seulement faire l’objet d’un traitement mécanique (broyage, tamisage). Comme aucune réaction chimique ne se produit, ils sont facilement recyclables et réutilisables.
Caractéristiques
En raison du retrait important qu’ils subissent en durcissant, les enduits à base d’argile sont très sensibles à la fissuration. Pour y remédier, des fibres végétales (paille ou lin, par exemple) sont souvent ajoutées à leur composition. Il arrive même que l’on prévoie un treillis d’armature. Malgré ces mesures, l’apparition de fissures ne peut jamais être totalement exclue.
Ces enduits sont également sensibles à l’humidité. Il convient d’éviter tout contact direct avec de l’eau. En d’autres termes, il est déconseillé de les appliquer dans des locaux humides (comme les salles de bains) ou aux endroits où ils sont susceptibles d’être aspergés.
En outre, les enduits à base d’argile disposent de caractéristiques mécaniques inférieures à celles des enduits habituels au plâtre ou à la chaux. Leur résistance à la compression et à la flexion est généralement moins bonne, par exemple. En conséquence, leur surface est plus sensible à l’usure et aux détériorations. Quant à leur adhérence au support, elle peut être décrite comme plutôt moyenne ou faible par rapport à celle des autres enduits intérieurs, mais elle est suffisante si le support est stable. Nous déconseillons vivement d’utiliser des enduits aux performances inférieures à celles de la classe S1 (voir tableau ci-dessous).
Dans tous les cas, ces enduits ne sont donc pas appropriés comme support pour la pose d’un revêtement carrelé.
Le tableau ci-dessus livre un aperçu des performances des enduits à base d’argile selon la norme allemande DIN 18947. Pour les caractéristiques des autres enduits intérieurs, on se référera aux Dossiers du CSTC 2014/2.8.
Les enduits à base d’argile peuvent contribuer à créer un certain effet tampon vis-à-vis d’éventuelles variations d’humidité relative du climat intérieur. Il est possible d’évaluer cette caractéristique à l’aide de la valeur du tampon hydrique (Moister Buffer Value en anglais, qui est déterminée selon le Nordtest-Report BYG DTU R-126, 2005). En fonction de leur épaisseur et de leur finition de surface, ces enduits peuvent disposer de bonnes propriétés de régulation de l’humidité (MBV 1-2 g/(m²%RH)), mais ils ne doivent en aucun cas être utilisés pour remplacer un système de ventilation efficace.
D’après la littérature, les enduits à base d’argile disposeraient de meilleures performances d’absorption acoustique. Or, ce n’est le cas que pour les enduits poreux (souvent projetés). Le coefficient d’absorption acoustique est fortement influencé par la finition des surfaces, comme expliqué dans Les Dossiers du CSTC 2021/2.6.
Mise en œuvre et aspect
L’application se fait habituellement en deux, voire plusieurs couches : un enduit de base et un enduit de finition. L’enduit de base, plus épais (10 mm ou plus), contient des fibres plus grossières et dissimule les éventuelles irrégularités du support. Lorsqu’il est sec, un enduit de finition (2 à 5 mm) peut être mis en œuvre. C’est lui qui donnera la teinte et l’aspect souhaités. Il est également envisageable de n’appliquer qu’une seule couche, à condition que le support soit homogène, plan et qu’il ait un pouvoir d’absorption uniforme. Si ces conditions ne sont pas réunies, la structure du support risque d’apparaître sous la surface de l’enduit, en raison d’un séchage non uniforme.
En général, les enduits à base d’argile sont choisis pour leur aspect rustique aux teintes de terre et pour leur structure moins lisse. Les nuances de teinte doivent être acceptées dans une certaine mesure, puisqu’il s’agit d’un matériau naturel appliqué manuellement. Etant donné qu’il se peut que ces enduits aient déjà la couleur et la structure souhaitées, il n’est pas nécessaire de prévoir une finition supplémentaire (couche de peinture, par exemple). Si une finition est quand même appliquée, il est conseillé d’opter pour une peinture à base d’argile ou un système de peinture ou d’enduit perméable à la vapeur.
Grâce à la solubilité dans l’eau des enduits à base d’argile, les détériorations ou les microfissures sont réparables jusqu’à un certain point en humidifiant légèrement l’enduit. Ces réparations sont susceptibles d’entraîner de légères variations de teinte. Une surface fragile ou sablonneuse (plus faible teneur en argile, par exemple) peut être renforcée au moyen d’une résine incolore ou d’une peinture spécifique. Quoi qu’il en soit, il est recommandé de consulter le fabricant avant toute réparation. Il faut aussi garder à l’esprit que tout traitement antérieur et postérieur peut avoir un impact sur les possibilités de recyclage de l’enduit.
Cet article a été rédigé dans le cadre de l’étude prénormative Clay-Bio-Masonry et de l’Antenne Normes ‘Parachèvement’ subsidiée par le SPF Economie.
Source : CSTC Contact 2021/4 (n°76), pp. 12-13.