Quand le béton se coule dans le Patrimoine

Afin de renforcer l’attractivité de l’Abbaye de Villers-la-Ville, haut lieu du tourisme en Wallonie, le Gouvernement wallon a confié à l’Agence wallonne du Patrimoine la conception et la mise en œuvre d’un schéma de développement à long terme. Il s’agissait en l’occurrence de remodeler totalement le Centre du Visiteur de l’Abbaye et d’élaborer un parcours didactique cohérent, le tout en faisant cohabiter harmonieusement respect du patrimoine, architecture contemporaine et valorisation touristique. C’est le projet proposé par Binario Architectes, un jeune bureau d’architecture liégeois, qui a été choisi. Un projet dans lequel le béton, sous de multiples formes, occupe une place importante.

 

Cage d'ascenseur version minérale

Dès l’entrée, le béton est omniprésent : béton voliges pour le socle d’accueil et béton lisse au sol. Une grande porte en aluminium marque le début de la visite. Les visiteurs peuvent emprunter le grand escalier qui mêle acier Corten, bois et aluminium ou prendre l’ascenseur, qui, de manière étonnante, est enserré dans une cage en béton voliges. « Comme le cahier des charges prévoyait explicitement la construction d’un ascenseur pour permettre l’accès aux personnes à mobilité réduite, nous avons néanmoins voulu éviter une cage d’ascenseur qui fasse penser à celles qu’on trouve dans les immeubles de bureaux ou les hôpitaux. Nous désirions quelque chose d’esthétique qui se marie harmonieusement, tant du point de vue de la texture que des teintes, avec l’antique mur de brique du moulin et la structure en acier Corten de l’escalier. Et comme il fallait quelque chose de solide,nous avons opté pour du béton. » Ce qui n’a d’ailleurs pas été sans mal… « Nous avons éprouvé quelques difficultés avec les voiles de béton. Comme il s’agissait de hauteurs importantes mais d’épaisseurs relativement faibles, dès qu’on décoffrait, le béton se laissait aller… Nous avons dû procéder à de nombreux essais avec l’entreprise avant de trouver la formule qui convenait ».

 

650 ans d'Histoire sur 250 mètres d'un parcours en béton lavé

Une fois la visite de l’espace multimédia et celle de la salle des maquettes effectuées, les visiteurs sont invités à quitter le moulin via la passerelle de 27 mètres de long en acier Corten pour rejoindre le parcours didactique en béton lavé, le long duquel une ligne du temps, en acier Corten, elle aussi, évoque l’histoire de l’Abbaye, de sa fondation en 1146 à l’expulsion des moines en 1796. « Là où serpente aujourd’hui ce sentier de visite, il s’agissait d’une colline mal entretenue qui occultait totalement la vue. Nous l’avons arasée, ce qui permet aujourd’hui d’avoir une vue en surplomb, totalement dégagée,sur l’ensemble du domaine cistercien ».

 

100 fois sur le métier, tu remettras ton ouvrage en béton pisé

Au terme de la promenade, le visiteur accède à l’ancien Jardin de la Pharmacie des moines où ceux-ci cultivaient une infinité de plantes médicinales. Il a depuis été reconverti en jardin ornemental. Le sol y est, une fois encore, carrossé de béton lavé, un revêtement qui présente à la fois l’avantage d’être suffisamment solide et pérenne pour supporter les déambulations de la cinquantaine de milliers de visiteurs annuels, et esthétiquement cohérent pour se fondre parmi les autres éléments minéraux. Mais ce qui frappe surtout c’est le garde-corps en béton pisé, lequel, outre son rôle fonctionnel, prend des allures de sculpture monumentale. « C’est à ma connaissance, l’une des premières applications en béton pisé en Belgique, en partie parce que l’exécution d’un tel ouvrage est assez complexe : on utilise un ferraillage en inox et on décoffre tout de suite, mais il faut éviter les coulées et faire en sorte que les strates soient suffisamment espacées, soit, dans ce cas, d’environ 70 cm. Nous avons procédé à énormément de tests sur les granulats,notamment pour obtenir les teintes et les dimensions désirées. En effet, selon le type de granulats, après avoir décoffré et nettoyé à l’eau, on obtient presque à chaque fois un résultat différent… », se désespère encore Andrea Tenuta, qui avait une idée bien précise de ce qu’il voulait obtenir comme résultat chromatique. Et il y tenait. « Ça peut sembler beaucoup d’efforts pour rien mais nous avions pu voir des exemples de réalisations en béton pisé en Italie et en Allemagne et nous avions été séduit parl’impression générale : c’était bien du béton mais ça n’en avait pas l’aspect habituel ; il y avait quelque chose de l’ordre d’une vibration qui s’en dégageait. »

Envie de lire l'article dans sa totalité ? C'est dans le numéro 29 de 'Regard sur le béton', de FEBELCEM.

Source: Febelcem
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