L’acier demande-t-il davantage d’entretien que le béton ? Dans quelle mesure la hauteur et la grandeur du bâtiment jouent-elles un rôle dans le choix du béton ou de l’acier ? Dans quels cas l’acier est-il le choix le plus intéressant et dans quels cas le béton ? Voilà quelques questions, parmi d'autres, auxquelles répond Gert Janssen, directeur engineering et développement chez Mathieu Gijbels, dans cette seconde partie de l'interview consacrée à la sécurité incendie.
L’acier demande-t-il davantage d’entretien que le béton ?
Voilà un malentendu fort répandu. Dans des circonstances normales, la peinture ignifuge n’a pas besoin d’être entretenue. Il faut cependant éviter d’abîmer la peinture pendant le montage. C’est pourquoi, chez Mathieu Gijbels, nous peignons toujours après finalisation des travaux de gros oeuvre.
Dans quelle mesure la hauteur et la grandeur du bâtiment jouent-elles un rôle dans le choix du béton ou de l’acier ?
Les constructions en acier sont plus avantageuses pour les grandes portées. Le béton, pour sa part, se prête mieux pour des bâtiments élevés. Dans le cas d’un feu dans des bâtiments industriels, la taille maximale des compartiments dépend de sa charge au feu. S’agissant de très grands compartiments, supérieurs à 20.000 m2, il vaut mieux construire en béton pour profiter de sa résistance intrinsèque au feu d’une heure.
Dans quels cas l’acier est-il le choix le plus intéressant et dans quels cas le béton ?
Il n’existe pas de réponse unique à cette question. Au niveau des coûts, l’acier est plus intéressant que le béton. Cela vaut surtout pour des immeubles où la résistance au feu exigée est faible voire nulle, comme les commerces et les bâtiments industriels. Si l’on souhaite une résistance au feu d’une heure, alors le coûte est presque identique pour l’acier et le béton. Si l’on veut obtenir une résistance au feu encore plus grande, le béton est la solution la plus économique, à moins qu’il y ait des raisons spécifiques d’opter pour l’acier. Comme il a déjà été dit, une réponse unique n’existe pas. On peut par exemple opter pour l’acier et le protéger avec un revêtement en Gyproc, de manière à obtenir une résistance au feu d’une bonne heure. Cela revient alors moins cher que le béton.
L’intégration de moyens de lutte contre l’incendie comme des installations EFC ou des sprinklers est-elle plus difficile avec du béton qu’avec de l’acier ?
À peine. Dans le cas de poutres en béton, on place des volets EFC pour limiter l’accumulation de la couche de fumée. La poutre en béton va retenir la couche de fumée si elle est plus large que la couche de fumée n’est épaisse. Un avantage car pas besoin d’ajouter des rideaux de fumée. Dans le cas de nombreuses poutres en béton, il faudra installer des trappes de désenfumage dans les espaces entre les poutres. Un potentiel inconvénient.
En ce qui concerne les sprinklers, il faut respecter une distance minimale de 1,5 mètre avec la poutre en béton. Dans la pratique, c’est facilement réalisable.
Avec quoi faut-il tenir compte lors de travaux ultérieurs ?
Aucune législation incendie n’est bien souvent d’application pour les bâtiments existants du fait que celles-ci sont relativement récentes. En cas d’extension, seule la nouvelle partie doit satisfaire à la législation. Cela génère des situations bizarres. C’est pourquoi, pour toute rénovation, une concertation avec la pompiers est exigée. Le corps local des pompiers peut aider à définir les caractéristiques d’un bâtiment à l’épreuve du feu. Les règles de bonne pratique incitent en effet à approcher la réglementation au plus près en cas de rénovation. Les pompiers doivent aussi toujours approuver au préalable le plan de sécurité incendie.
Qui choisit entre béton et acier ?
Chez Mathieu Gijbels, nous opérons un tel choix de préférence en équipe de construction. Mais il y a parfois des intérêts contradictoires ou différents. Un maître d’ouvrage fera plutôt un choix émotionnel alors que l’architecte pensera à l’esthétique. Il souhaite l’élégance et la minceur ? Il optera dans ce cas pour l’acier. Un aspect robuste et massif fera plutôt pencher pour le béton. L’ingénieur envisagera la stabilité et la résistance au feu, tandis que l’entrepreneur fera son choix sur base du coût.
Pour conclure : quels sont les conseils à donner aux concepteurs ?
Le conseil le plus important : consultez les pompiers. Renseignez-vous avant de demander un permis. Cela évitera des frais ultérieurs.
Un deuxième conseil : faites-vous aider par des personnes ou des entreprises qui maîtrisent le sujet, comme nous-mêmes ou des bureaux d’études. Si cela s’avère nécessaire et permet une grande économie budgétaire, elles peuvent faire appel à un fire safety engineer.