L'espace disponible se faisant rare, il faut souvent procéder à une extension verticale. Surélever donc, le toit existant devenant le plancher du nouveau volume. Gert Janssen, directeur engineering et développement chez Mathieu Gijbels, passe en revue les points d'attention lors d'une surélévation.
En quelles circonstances opte-t-on pour une surélévation ?
Gert Janssen : Dans le cas de bâtiments industriels ou commerciaux, il est souvent important de rester à la même adresse, et ce pour plusieurs raisons : les clients se trouvent dans les environs ou les employés habitent à proximité et l'on souhaite limiter au maximum les trajets domicile-travail. Par ailleurs, le site peut se révéler trop exigu, ce qui impose de s'étendre en hauteur. Dans un environnement urbain, les extensions prennent également souvent la forme de surélévations, toujours en raison du manque de surface disponible au sol.
Surélever sur un toit plat ou sur un toit en pente. Quelles sont les possibilités et limites de ces deux cas de figure ?
Gert Janssen : Une toiture en pente devra presque toujours être enlevée. Dans le cas d'un toit plat, il faut être attentif : un toit n'est en effet pas forcément un plancher. Un toit qui semble assez résistant à première vue peut avoir une portance insuffisante pour faire office de plancher. Même dans le cas d'un toit en béton, on ne peut pas considérer d'office que la portance est suffisante. Dans un projet urbain que nous menons actuellement, nous sommes confrontés à un toit plat en béton de 8 cm d'épaisseur. C'est insuffisant pour fonctionner comme plancher. Un toit est généralement calculé pour supporter les charges de l'entretien et de la neige. Il s'agit là de charges beaucoup plus faibles que par exemple un nouvel appartement ou un bureau en surélévation, qui fait rapidement 200 à 300 kg supplémentaires par mètre carré. De nombreux maîtres d'ouvrage sont ainsi étonnés qu'il faille procéder à des travaux d'adaptation à la toiture.
En quoi consistent ces travaux d'adaptation ?
Gert Janssen : on peut poser un nouveau plancher au-dessus du toit en le faisant reposer uniquement sur des colonnes. Les murs et les colonnes ont généralement une portance suffisante, contrairement à la dalle ou aux poutres. Il est aussi possible d'utliser une dalle existante comme coffrage d'une nouvelle dalle. La décision dépend de la hauteur disponible.
Quels sont les matériaux courants pour la structure d'une surélévation ?
Gert Janssen : La plupart du temps, les bâtiments existants n'ont pas été construits à l'époque en prévoyant une surélévation future. Le facteur le plus important est l'économie de poids. Tant pour la structure portante - ce qui nous mène rapidement à une ossature en bois ou en acier - que pour la finition. Il est d'ailleurs souvent impossible de travailler avec une chape. C'est pourquoi, lors d'une surélévation, il faut chaque fois bien contrôler les fondations existantes. Si elles ne suffisent pas, il y a problème.
Le béton est peu utilisé pour la structure de l'extension, le bâtiment devant dans ce cas déjà être prévu au départ pour supporter un volume supplémentaire. Et il y a la question du coût. Souvent, une ossature en bois est plus chère qu'une construction métallique. Pour une construction passive, on choisira plutôt le bois.
Comment solutionner un problème de fondations ?
Gert Janssen : Tout d'abord, il est compliqué de savoir à quelles fondations on a affaire. Dans de nombreux cas, l'absence de plans nous contraint à procéder à un examen destructif. Si le résultat de cet examen montre qu'il s'agit de fondations sur pieux, on a peu de soucis à se faire car de telles fondations donnent de la marge. Il s'agit seulement alors de limiter le poids du volume supplémentaire. Cela devient plus problématique dans le cas de trop petites semelles. Il faut alors les remplacer par de petits pieux car il est souvent impossible de les agrandir. Et il s'agit là d'interventions relativement coûteuses.
Quel est l'impact sur l'étanchéité à l'air et à l'eau ?
Gert Janssen : En matière d'étanchéité à l'eau, il faut bien planifier le chantier. Fermer le jour même ce que l'on a ouvert et tenter de réaliser les travaux quand les conditions météorologiques le permettent. Une parfaite étanchéité à l'air et l'obtention de la norme passive ne constituent pas un problème lors de surélévations.
Faut-il tenir compte de certains éléments en matière de sécurité incendie ?
Gert Janssen : S'il s'agit au départ d'un bâtiment bas suivant la norme devant un bâtiment moyen du fait de la surélévation, il se peut que le toit, qui avait une résistance au feu d'une demi-heure, doive à présent présenter une résistance au feu d'une heure parce qu'il est devenu un plancher. Les implications ne sont pas nombreuses mais une législation différente peut être applicable parce que le bâtiment dépasse une certaine hauteur après surélévation.
Dans quels secteurs pratique-t-on le plus la surélévation ?
Gert Janssen : Nous remarquons que c'est souvent le cas dans un contexte de centre urbain ou de périphérie, où l'on ajoute quelques niveaux au-dessus d'un immeuble à appartements. Quand on surélève en ville, on dispose de très peu de place pour travailler. On va donc essayer de limiter les transports et monter un maximum de préfabriqué pour engendrer le moins de nuisances possible. Autre cas de figure fréquent : des bureaux que l'on ajoute au-dessus d'infrastructures existantes.
Pour conclure, le conseil en or en matière de surélévation
Conserver les plans du bâtiment existant. Cela facilite énormément les choses. Et ensuite : travailler avec des matériaux légers.